Quels sont les risques pour un auto entrepreneur sans décennale ?
La loi sur l’assurance est claire : tous les artisans du bâtiment, du peintre au maçon en passant par l’électricien doivent souscrire à cette garantie pour protéger leurs clients lors de travaux de construction ou de rénovation. Mais qu’en est-il des auto-entrepreneurs ? Les sous-traitants sont-ils également concernés ? Quels sont les risques encourus si un chef d’entreprise fait l’impasse sur cette assurance ? Dans cet article nous répondons à toutes vos questions à propos de l’assurance décennale.
L’assurance décennale : obligatoire pour qui ?
Avant de rentrer dans le vif du sujet, il convient de faire un point sur l’assurance décennale et les professionnels soumis à cette obligation.
La garantie décennale, instaurée par la loi Spinetta en janvier 1978, couvre pour une durée de 10 ans les éventuels dommages survenus après réception des travaux par le maître d’ouvrage. C’est donc une protection qui garantit au client la prise en charge par l’assureur des frais liés à la réparation de ces dommages.
Auto-entreprise, SAS, EURL, EIRL… la loi ne fait aucun distinction en ce qui concerne le statut juridique de l’entreprise et tous sont concernés par l’assurance décennale : « Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivant du Code civil, doit être couverte par une assurance. » (Article L 241-1 du code des assurances).
Ainsi, qu’ils exercent en gros œuvre (maçons, couvreurs, charpentiers, etc.) ou second œuvre (peintres, électricien, plombiers, etc.), les artisans du bâtiment sont soumis à la souscription de la garantie décennale.
Pour qu’elle soit valable, le professionnel doit souscrire son assurance décennale avant la date d’ouverture du chantier (DOC). Les professionnels du gros œuvre doivent justifier d’une expérience d’au moins 3 ans dans leur domaine, alors que ceux qui pratiquent une activité moins risquée du second œuvre devront justifier 2 ans d’expérience.
Auto entrepreneur sans décennale : quels sont les risques encourus ?
En l’absence de décennale, le professionnel est doublement responsable : naturellement pour défaut d’assurance, mais également pour les dégâts qu’il a causés. Ainsi, la société, l’artisan indépendant ou l’auto entrepreneur qui se trouve en « défaut d’assurance » soit parce cette dernière n’a pas été renouvelé ou parce que le contrat n’a simplement jamais été souscrit, se verra lourdement sanctionné.
Les sanctions légales
Le professionnel du BTP qui se trouve en défaut d’assurance encours une amende civile d’un montant maximum de 75 000 € et d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à 6 mois. Mais dans les faits, les peines appliquées sont généralement plus faibles : amendes de 2 000 à 6 000 € et prison avec sursis. Quoi qu’il en soit, les frais de procédure de la partie adverse restent à la charge du professionnel jugé, ce qui s’élève à plusieurs milliers d’euros.
Les risques personnels
Suite à une décision prise par la Cour de Cassation en 2010, une jurisprudence précise que « Le dirigeant qui ouvre sciemment un chantier sans que son entreprise soit garantie au titre de la responsabilité décennale commet une faute intentionnelle ». Il en va donc de sa propre responsabilité si des dégâts sont observés. D’autant plus que les préjudices en question (effondrement du bâtiment en question, fissure, etc.) représentent là aussi plusieurs milliers d’euros, souvent bien plus que le chiffre d’affaires annuel d’une auto-entreprise. Dans certains cas, les professionnels sont poursuivis à titre personnel et mettent en péril leurs biens et leurs familles.
L’impact sur la réputation
Si l’entreprise parvient à survivre aux pertes financières engendrées par le procès, c’est la réputation et la confiance des clients envers l’entreprise qui en prendra un coup. En effet, le bouche-à-oreille est un excellent moyen de communication, surtout dans le secteur du bâtiment, mais il peut également porter préjudice lorsqu’il s’agit d’informations négatives.
Le cas particulier du sous-traitant
L’auto-entrepreneur dans le bâtiment qui exerce en tant que sous-traitant n’est par définition pas directement en contact avec le Maître d’Ouvrage (le client). Cela signifie que sa responsabilité n’est pas engagée envers lui, mais envers la société pour laquelle il travaille. Par conséquent, l’assurance décennale n’est pas obligatoire pour un sous-traitant. En revanche, dans les faits, la souscription à cette garantie reste tout de même vivement recommandée et parfois même exigée par les sociétés qui ont recours à la sous-traitance (clause possible dans le contrat de louage). En cas de dommages, le donneur d’ordre a la possibilité de se retourner contre l’auto-entrepreneur sous-traitant au titre de sa responsabilité contractuelle et ce dernier devra donc payer les frais de sa poche.
L’assurance décennale pour auto entrepreneurs : quels sont les tarifs ?
Calcul du montant de la souscription
Le coût de souscription d’une assurance décennale dépend de plusieurs facteurs :
- La nature de l’activité exercée par l’auto-entrepreneur : certaines professions présentent moins de risques que d’autres. Ainsi, les auto-entrepreneurs dans le gros œuvre comme les maçons ou les charpentiers devront s’affranchir d’un montant plus élevé que celui d’un professionnel de second œuvre comme les peintres ou les plaquistes ;
- La zone géographique du chantier : le prix d’une garantie décennale peut doubler en fonction du lieu d’exploitation et s’avère plus cher dans une grande ville que dans un lieu moins peuplé ;
- Le chiffre d’affaires : l’auto-entrepreneur ayant un chiffre d’affaires plafonné, il paiera moins d’assurance qu’un autre type de société. À l’heure de la souscription, le micro-entrepreneur devra ainsi prendre soin de déclarer un chiffre d’affaires prévisionnel bas, se rapprochant au mieux de la valeur réelle ;
- Le niveau d’expérience : le nombre d’années d’exercice a un impact sur le montant de la souscription. Un auto-entrepreneur qui pratique son activité depuis plusieurs années et qui peut le justifier via des attestations ou des fiches de paie bénéficie d’une réduction conséquente. À l’inverse, le professionnel débutant qui ne peut pas justifier son expérience se verra sera majoré de 10 % ;
- L’assureur : MMA, Maaf, Pro BTP, MMA… la compagnie fixe ses tarifs librement et elle est également à même d’accepter ou de refuser une demande de souscription ;
- Les antécédents du professionnel : un auto-entrepreneur qui dispose d’une garantie décennale depuis plusieurs années et qui n’a fait l’objet d’aucun sinistre pourra bénéficier d’une réduction.
Exemples de tarifs annuels de garantie décennale en fonction de l’activité et de l’expérience
- Plombier : de 800 à 1 500 € ;
- Électricien : de 800 à 1 400 € ;
- Plaquiste : 800 à 1 500 € ;
- Peintre : 600 à 1 000€ ;
- Couvreur : 1 700 à 2 200 € ;
- Maçon : 1 000 à 2 000 € ;
Réduire les coûts de l’assurance décennale : conseils aux auto-entrepreneurs
Il existe des solutions pour que les frais liés au contrat d’assurance décennale pèsent moins sur le chiffre d’affaires des micro-entrepreneurs :
- Comparer les offres : le contrat d’assurance décennale est à tacite reconduction, cela signifie que si aucune demande n’est effectuée par le client, il est automatiquement reconduit d’une année sur l’autre. Cela veut également dire que le professionnel du bâtiment peut changer de compagnie d’assurance chaque année. Il est donc important de comparer régulièrement les offres, de procéder à des demandes de devis. À savoir que les assurances les moins chères ne sont pas toujours les meilleures, car elles engageront parfois la responsabilité du client malgré la garantie décennale ;
- Faire appel à un courtier : cet expert des assurances procède aux comparaisons, entre en contact et négocie avec les compagnies d’assurance à la place du professionnel. Il s’assure également de trouver une garantie adaptée à ses besoins et son budget. Gain de temps et économie sont alors assurés ;
- Supprimer les garanties de l’assurance : parfois, toutes les garanties incluent dans un contrat ne sont pas nécessaires. D’autant plus qu’en fonction de l’activité, les entreprises ne sont pas soumises aux mêmes obligations. Le professionnel du BTP peut alors procéder à la rationalisation de celles-ci en retirant certaines lui paraissant optionnelles ou en rassemblant des garanties au sein d’un seul et même contrat.
Les questions les plus fréquentes
Obligatoire pour l’auto-entrepreneur dans le bâtiment, l’assurance décennale est une charge fixe. Pour bien choisir sa garantie décennale, il convient de prendre en compte plusieurs facteurs importants : tarifs, dommages couverts et plafond de prise en charge. Il faudra ensuite s’assurer que les garanties couvertes sont bien adaptées à l’activité exercée. D’ailleurs, certains contrats sont flexibles et peuvent évoluer au fil du temps.
La garantie décennale couvre les frais liés à d’éventuels dommages causés lors des travaux, et ce pour une durée de 10 ans. Le professionnel évite donc la faillite pouvant survenir à la suite de réparations exigée et d’un procès long et coûteux. C’est aussi un contrat qui renforce la confiance chez les potentiels clients.
Oui, les micro-entrepreneurs multiservices dont l’activité touche au secteur du bâtiment doivent obligatoirement souscrire une assurance décennale, sous peine de sanctions légales identiques à celles d’un autre auto-entrepreneur ou d’un autre type de société (6 ans d’emprisonnement et jusqu’à 75 000 € d’amende).